LA BELLA Y LA BESTIA

 

Personajes

BELLA

BESTIA

EL PADRE

LUDOVIC

FELICIE

ADELAIDA

AVENAT

ARDENT

USURERO

OFICIAL  

Muchacha Joven y Bella

Ser Deforme y Solitario

Padre de Bella

Hermano de Bella

Hermana de Bella

Hermana de Bella

Enamorado de Bella

Joven Príncipe

Prestamista

Funcionario del Puerto

Mezzosoprano

Barítono

Barítono

Barítono

Soprano

Soprano

Barítono

Barítono

Barítono

Barítono

 

La acción se desarrolla en un país imaginario, en época indeterminada.

 

OUVERTURE 


Les Soeurs 

(Ludovic et Avenant jouent aux flèches visant une 
cible fixée sur un des murs de la maison. Félicie 
et Adélaïde sont à l'intérieur) 

ADELAIDE
Oh, celle-là! Elle ne sait rien faire.

LUDOVIC
Mauvais. Ton pied!

AVENANT
Quoi, mon pied?

LUDOVIC
Tu triches, il n'est pas sur la ligne.

(Avenant tire. La flèche traverse la fenêtre, 
touchant de près le chien des deux soeurs) 

ADELAIDE
Oh, ma robe!

FELICIE
Mais qu'est-ce que tu as?

ADELAIDE
Ils ont tiré une flèche dans la chambre.

FELICIE
Espèce de voyous! 
Vous pouviez nous crever un oeil.

AVENANT 
Belle n'a rien?

ADELAIDE
Belle. Toujours Belle. Peu importe Belle.
Vous avez failli tuer Cabriole.

LUDOVIC 
Les voilà.

FELICIE 
Belle, tu nettoieras le parquet; 
nous allons être en retard chez la duchesse.

ADELAIDE
Assassins!

LUDOVIC 
Mes soeurs sont des garces.

FELICIE 
Boire. Courir les filles. 
Pour le reste, ils s'en moquent.

LUDOVIC 
Quand on n'a plus d'argent, on reste à la maison, 
à laver le linge... Non mais! 
Regardez-moi ces garces qui ne se rendent 
même pas compte qu'on leur rit au nez.

ADELAIDE
Mais réponds-lui...

FELICIE 
Il serait trop content.

LUDOVIC 
Oh les belles. Oh comme elles sont belles!

ADELAIDE
Dépêchons-nous, nous allons manquer le concert.

LUDOVIC 
Oh, les ravissantes, les divines!

ADELAIDE
Petit laquais!

LUDOVIC
(L'imitant)
Petit laquais!

ADELAIDE
Petit laquais!

FELICIE
(Trouvant le laquais endormi sur une chaise 
de porteurs)
Oh! C'est incroyable!

ADELAIDE
Est-ce pour dormir qu'on vous paie?
Je n'ai jamais rien vu de pareil.
Oh! Ces chaises sont des immondices!

FELICIE 
Petits laquais, petits laquais!

ADELAIDE
Vite, vite. Dépêchez-vous.

LAQUAIS
Allez, on part.

ADELAIDE
Pas sous l'échelle.

FELICIE
Vous traînez. Vous dormez. Vous avez bu!

ADELAIDE
Voyez cet ivrogne qui ne sait même pas son monde!

FELICIE 
Ce va-nu-pieds, ce bon à rien.

ADELAIDE
Ah, mais ils ont bu, ils ont bu!

LUDOVIC 
Allons, allons, allons... 
Le diable vous éclabousse et vous couvre de crotte.

La Demande en Mariage D'avenant 

(La Belle est en train de laver le parquet) 

AVENANT
Belle, vous n'êtes pas faite pour être une servante;
même le parquet veut devenir votre miroir. 
Vous ne pouvez plus travailler du matin au soir.

LA BELLE
Si les bateaux de notre père 
n'avaient pas été perdus dans la tempête... 
Mais nous sommes ruinés...

AVENANT 
Je me demande pourquoi ce ne sont pas 
vos soeurs qui travaillent.

LA BELLE
Mes soeurs sont trop belles, 
elles ont les mains trop blanches.

AVENANT 
Belle. Vous êtes la plus belle. 
Regardez vos mains...

LA BELLE
Laissez mes mains, 
et retirez-vous que je finisse mon ouvrage.

AVENANT 
Je vous aime. Epousez-moi.

LA BELLE
Non, Avenant. Ne m'en parlez plus.
C'est inutile.

AVENANT 
Je vous déplais.

LA BELLE
Non, Avenant.

AVENANT 
Alors?

LA BELLE
Je veux rester fille et vivre avec mon père.

AVENANT 
Belle, je vous arracherai de force à ces filles stupides.

LA BELLE
Laissez-moi!

LUDOVIC 
(Ludovic entre dans la pièce)
Bas les pattes. 
Tu veux que je te casse la gueule?

LA BELLE
Laisse, Ludovic. 
Avenant me demandait en mariage.

LUDOVIC 
Qu'est ce que tu lui as répondu?

AVENANT 
Elle m'a refusé.

LUDOVIC 
Bravo, Belle. Je suis un chenapan, je m'en vante, 
mais je ne supporterai pas de te voir 
en épouser un autre.
Qu'il se le tienne pour dit. 
Allez, crapule, vide les lieux!

(Avenant frappe Ludovic) 

LA BELLE
Ah! Avenant, vous êtes fou! Ludovic, Ludovic...

(Le père entre dans la maison, en compagnie de 
trois hommes) 

LE PERE 
Entrez, Messieurs. Je veux que vous soyez 
des nôtres lorsque j'annoncerai la grande nouvelle.

LA BELLE
Mon père! Qu'il ne sache rien!

LE PERE 
Mes filles sont dans le grand monde; on les cajole.
Je ne les attendrai pas. Viens près de moi, Belle.
Approche, Ludovic. Et toi aussi, Avenant. 
Tu n'es pas de trop. 
Ces messieurs vous pardonnent vos incartades. 
Nous allons devenir riches. 
Un de mes vaisseaux de marchandises est arrivé au port.

LUDOVIC 
Avenant le savait.

AVENANT 
Ludovic!

LUDOVIC 
Il en a profité pour demander la main de Belle.

LA BELLE
Ce n'est pas la première fois 
qu'il me la demande depuis notre ruine.

LE PERE 
Tu veux donc me quitter?

LA BELLE
Non, mon père, je ne vous quitterai jamais.

(Adélaïde et Félicie entrent dans la pièce) 

FELICIE 
On nous a dit que la duchesse ne recevait pas. 
Nous venons de récolter le fruit de vous sottises.

ADELAIDE
Vous pouvez être fier.

FELICIE 
Vous invitez du monde à boire 
pendant qu'on insulte vos filles.

LE PERE 
Mes petites!
Cette duchesse m'a l'air d'une femme très bien.

ADELAIDE
On crève de honte!

FELICIE 
Viens, Adélaïde, laissons-les boire à notre malheur.

LA BELLE
Mon père, mon père...

LE PERE 
Ce sont de vrais diables. 
J'ai de quoi les consoler.
Demain matin je partirai arranger nos affaires au port. 
Messieurs.

Le Voyage du Père 

(Le lendemain. Le père se prépare à partir pour 
le port) 

ADELAIDE
Apportez-nous des robes de brocart, 
des bijoux et des plumes d'autruche...

FELICIE 
Pour que toute la ville en crève de jalousie. 
Un singe. Je voudrais un singe.

ADELAIDE
Un perroquet!

LE PERE 
Et toi, Belle. Qu'est-ce que je te rapporte?

LA BELLE
Mon père, rapportez-moi une rose. 
Car il n'y en a pas ici.

(Adélaïde et Félicie explose de rire... Plus tard, dans 
une taverne. Avenant et Ludovic sont en train de boire) 

LUDOVIC 
Si je ne paie pas ma dette ce soir, 
on me met en prison.

AVENANT 
Un usurier comprend vite. 
Je lui ai tout expliqué. Le voilà.

USURIER
C'est une très, très grosse somme...

AVENANT 
Un des vaisseaux perdus est rentré au port.

LUDOVIC 
Je vous rembourse dès le retour de mon père.

USURIER
Vous connaissez la loi. 
Si vous êtes insolvable, 
je réclame la somme à votre père. 
Si votre père est insolvable, je prends ses meubles.

AVENANT 
Signe, qu'est-ce que tu risques?

(En ville, dans le bureau d'un officier du port) 

OFFICIEL DU PORT
Que voulez-vous que j'y fasse?

LE PERE 
Mais s'il ne me reste rien de ce dernier vaisseau, 
que vais-je devenir?

OFFICIEL DU PORT
Vos créanciers du port ont été plus rapides 
que ceux de la ville. Faites un procès.

LE PERE 
Un procès, il ne me reste même pas 
de quoi coucher dans une auberge du port.

OFFICIEL DU PORT
Et bien, rentrez chez vous.

LE PERE 
Mais... il me faut traverser la forêt, je vais me perdre!

OFFICIEL DU PORT
Vous l'avez déjà traversée pour venir.

LE PERE 
Il y avait clair de lune. 
Maintenant il va y avoir du brouillard. Je vais me perdre.

OFFICIEL DU PORT
Et bien, perdez-vous!

LE PERE 
J'aimerais bien vous voir à ma place! C'est effrayant!

OFFICIEL DU PORT
Bonsoir!... Bon voyage!

(Perdu dans la forêt, le père arrive dans un château 
dont les portes s'ouvrent à lui) 

LE PERE 
Il y a personne?
Il y a quelqu'un?

Le Domaine de La Bête 

(Il pénètre dans le château) 

Il y a personne?

(La salle à manger du château. Des mains invisibles 
lui servent un repas magique, puis il s'endort... Puis 
se réveillant, il quitte le château) 

LA BETE 
Eh là!
Eh là!

(Le père découvre une très belle rose et finit 
par la cueillir) 

Eh là! Alors, cher monsieur. Vous volez mes roses...
Vous volez mes roses 
qui sont ce que j'aime le mieux au monde. 
Vous jouez de malchance, 
car vous pouviez tout prendre chez moi, sauf mes roses. 
Et il se trouve ce simple vol mérite la mort.

LE PERE 
Monseigneur, je ne savais pas. 
Je ne croyais offenser personne 
à cueillir cette rose pour ma fille.

LA BETE 
On ne dit pas "Monseigneur", on dit "La Bête". 
Je n'aime pas les compliments. 
Ne cherchez pas à comprendre. 
Vous avez un quart d'heure 
pour vous préparer à mourir.

LE PERE 
Monseigneur...

LA BETE 
Encore! 
La Bête vous ordonne de vous taire. 
Vous avez volé mes roses et vous mourrez! 
A moins... qu'une de vos filles... 
Combien en avez-vous?

LE PERE 
Trois.

LA BETE 
A moins qu'une de vos filles ne consente à payer 
pour vous, et à prendre votre place.

LE PERE 
Mais...

LA BETE 
Ne raisonnez pas. Filez! 
Profitez de la chance que je vous donne. 
Et si vos filles refusent de mourir à votre place, 
jurez de revenir dans trois jours.

LE PERE 
Je le jure... 
Encore faudrait-il que je puisse retrouver ma route. 
Je me suis perdu en forêt.

LA BETE 
Vous trouverez dans mes écuries un cheval blanc.
Son nom est Le Magnifique. 
Il n'y a qu'à lui dire à l'oreille: 
"Va où je vais, Le Magnifique, va, va, va." 
Il vous mènera chez vous, 
et vous reconduira au château si vos filles sont 
trop lâches pour l'enfourcher à votre place. 
Filez!

Le Retour du Père 

(La maison du père) 

LE PERE
Je ne sais pas si le voyage a été court ou interminable.
Le Magnifique est dans notre écurie. 
Voilà mon histoire.
Belle, prends cette rose, elle me coûte bien cher.

FELICIE 
Voilà ce qui arrive quand une sotte demande 
qu'on lui apporte des roses.

ADELAIDE
Et qui veut faire la modeste, et nous donner des leçons. 
Elle ne pleure même pas.

LA BELLE
Vous ne mourrez pas, mon père, c'est ma faute.
Que j'aille à votre place!

AVENANT 
Nous irons avec Ludovic. 
Et nous tuerons cette épouvantable bête.

LE PERE 
La puissance de cette bête est si grande 
qu'il ne nous reste aucun espoir. 
Tiens-toi tranquille, Belle.
Je suis vieux, j'ai promis, j'irai.

FELICIE 
Vous n'irez pas, mon père. 
Vous pouvez encore gagner votre procès.

ADELAIDE
Comment allons-nous vivre?

LE PERE 
Vous vendrez mes meubles.

LUDOVIC 
Pourquoi n'irais-tu pas, Félicie? 
Tu es trop coriace pour qu'on te mange.

FELICIE 
C'est grand dommage que cette bête 
ne réclame pas les garçons.

LE PERE 
Mes enfants! Du calme.

LA BELLE
Mon père. J'aime mieux être dévorée par ce monstre
que de mourir du chagrin que me donnerait votre perte.

AVENANT 
Vous n'irez pas chez ce monstre.

FELICIE 
De quoi vous mêlez-vous?

AVENANT 
Je me mêle de ce qui me plaît!

ADELAIDE
Seriez-vous amoureux de cette idiote? 
Ça ferait une belle paire.

LUDOVIC 
Avenant, gifle-la!

LE PERE 
Du calme, du calme.

AVENANT 
Répétez! Répétez ce que vous venez de dire.

FELICIE 
Une idiote et un idiot!
Il m'a frappée!

ADELAIDE
Voyou! Canaille!

LUDOVIC 
Tu te permets de gifler ma soeur!

AVENANT 
Toi, si tu veux une gifle, j'en ai plein les mains!

ADELAIDE
Tricheur! Voleur!

LE PERE 
Mes enfants. Mes enfants!

LA BELLE
Ludovic, il se trouve mal.

AVENANT 
Transportons-le dans sa chambre.

(Avenant, Ludovic et la Belle transportent le père 
hors de la pièce) 

FELICIE 
Il m'a frappée, Adélaïde.

ADELAIDE
Et nous n'avons plus le sou!

FELICIE 
Ne nous laissons pas aller. 
La Bête les dévorera tous!
Et nous épouserons des princes.

La Belle va au Château 

(Dans l'écurie. La Belle monte à cheval blanc) 

LA BELLE
Va où je vais, Le Magnifique, va, va, va!

(La Belle arrive au château. D'étranges voix 
lui parlent) 

LA BETE 
La Belle, je suis la porte de votre chambre.
Je suis votre miroir, la Belle. 
Réfléchissez pour moi, je réfléchirai pour vous.

LA BELLE
Oh!

(La belle va dehors et La Bête apparaît) 

LA BETE 

Où allez-vous?
LA BELLE
(S'évanouissant)
Oh!

(La Bête porte la Belle sur son lit... Elle se réveille) 

LA BETE 
Belle, il ne faut pas me regarder dans les yeux.
Ne craignez rien, vous ne me verrez jamais, 
sauf chaque soir, à sept heures, où vous dînerez 
et où je viendrai dans la grande salle. 
Il ne faut pas me regarder dans les yeux.

Le Dîner 

(Dans la salle à manger du château. La Belle est assise 
à table lorsque la Bête apparaît) 

LA BETE 
N'ayez pas peur.

LA BELLE
Je... Je n'aurai pas peur.

LA BETE 
Acceptez-vous que je vous vois souper?

LA BELLE
Vous êtes le maître.

LA BETE 
Non! Il n'y a ici de maître que vous.
Je vous répugne.
Vous me trouvez bien laid.

LA BELLE
Je ne sais pas mentir, la Bête.

LA BETE 
Tout est-il ici à votre convenance?

LA BELLE
Je ne me trouve pas très à l'aise dans ces beaux atours. 
Mais je devine que vous essayez 
de me faire oublier votre laideur.

LA BETE 
Mon coeur est bon. Mais je suis un monstre.

LA BELLE
Il y a bien des hommes qui sont plus monstrueux 
que vous, et qui le cachent.

LA BETE 
Outre que je suis laid, je n'ai point d'esprit.

LA BELLE
Vous avez l'esprit de vous en rendre compte.

LA BETE 
Tout ce qui se trouve dans ce château vous appartient... 
Exprimez vos moindres caprices.
J'apparaîtrai chaque soir à sept heures.
Je devrai vous poser une question, toujours la même.

LA BELLE
Quelle est cette question?

LA BETE 
Belle. Voulez-vous être ma femme?

LA BELLE
Non, la Bête!

LA BETE 
Adieu donc, Belle. A demain.

Les Tourments de La Bête 

(La Bête cherche en vain la Belle, puis il entre dans 
sa chambre) 

LA BETE 
Où est Belle? Où est Belle?

(Belle entre dans sa chambre) 

LA BELLE
Pourquoi êtes-vous dans ma chambre?

LA BETE 
Je suis venu dans votre chambre 
vous apporter un cadeau.

LA BELLE
Sortez! Sortez!

Promenade dans Le Jardin 

(La Belle se promène dans le jardin, et découvre 
la Bête lapant l'eau d'un bassin. Elle poursuit sa 
marche et la Bête va à sa rencontre)

LA BETE 
Je vous croyais en train de souper.

LA BELLE
Je préfère me promener avec vous.

LA BETE 
C'est un grand privilège que vous me faites.
Un grand privilège.

LA BELLE
Vous avez la voix plus douce.

LA BETE 
Belle. Vous ne vous ennuyez pas trop toute la journée?

LA BELLE
Je trouve les journées longues. 
J'avoue que j'attendais presque sept heures.

LA BETE 
Quand je vous vois si bonne, j'ose à peine vous poser 
la question qui m'angoisse et qui me fait du mal.

LA BELLE
Posez-la, j'y répondrai toujours de la même manière.
Soyons amis, la Bête. Ne me demandez rien de plus.
Et que faites-vous toute la journée?

(Le bruit d'un cerf trouvant son chemin en forêt, 
distrait la Bête) 

M'entendez-vous, la Bête? Je vous parle.

LA BETE 
E... excusez-moi.

LA BELLE
Eh, la Bête. Où êtes-vous?

LA BETE 
Excusez-moi.
Excusez-moi, ce n'est rien.

LA BELLE
Mais qu'avez-vous, la Bête?

LA BETE 
J'ai soif, la Belle.

(La Belle se dirige vers la fontaine) 

LA BELLE
Buvez dans mes mains.

LA BETE 
Cela ne vous répugne pas de me donner â boire?

LA BELLE
Non, la Bête, cela me plaît. 
Je ne voudrais jamais vous causer la moindre peine.

LA BETE 
Et cependant, votre rêve est d'être loin de moi.

(Un autre jour. La Bête entre dans la grande salle à
sept heures et demi précise) 

LA BELLE
Comme vous êtes en retard!

LA BETE 
Je vous remercie, Belle, de l'avoir remarqué.

LA BELLE
Je vous attendais, la Bête. Il faut que je vous parle.

LA BETE 
Belle. Belle. Belle!

LA BELLE
Je ne peux vivre sans aller voir mon père.

LA BETE 
Debout, Belle, debout! 
C'est à moi de m'agenouiller 
et de prendre vos ordres.

LA BELLE
Laissez-moi aller et revenir!

LA BETE 
Au retour, Belle, serez-vous ma femme?

LA BELLE
Vous me tuez!

LA BETE 
Je sais que je suis très horrible. 
Mais je mourrai de douleur si je vous renvoie 
et si vous en profitez pour ne jamais revenir.

LA BELLE
Je reviendrai au bout d'une semaine. 
Je vous estime trop pour vouloir causer votre mort.

LA BETE 
Vous me flattez comme on flatte un animal.

LA BELLE
Mais vous êtes un animal.

LA BETE 
Ce que vous me demandez est bien grave.
Il faut que j'y réfléchisse.
Belle, voulez-vous m'accompagner au jardin?

(Ils marchent dans le jardin) 

Belle, vous a-t-on déjà demandée en mariage?

LA BELLE
Oui, la Bête!

LA BETE 
Ah!
Qui... vous a demandée en mariage?
Un homme jeune?

LA BELLE
Oui, la Bête.

LA BETE 
Il était beau?

LA BELLE
Oui, la Bête.

LA BETE 
Pourquoi ne l'avez-vous pas épousé?

LA BELLE
Je ne voulais quitter mon père.

LA BETE 
Et quel était le nom de ce beau jeune homme?

LA BELLE
Avenant.
La Bête, qu'avez-vous?

(La Bête prend la fuite) 

La Bête, la Bête, qu'est-ce qu'il y a, la Bête?

(Le même soir. La Belle est dans sa chambre. La Bête 
apparaît à sa porte) 

Que faites-vous devant ma porte?
Dieu! Vous avez du sang!

LA BETE 
Pardon...

LA BELLE
De quoi me demandez-vous pardon?

LA BETE 
D'être "Bête". Pardon.

LA BELLE
Ces paroles vous conviennent aussi mal que possible. 
N'avez-vous pas honte? Nettoyez-vous, et allez dormir.

LA BETE 
Fermez votre porte! Fermez votre porte! Vite.
Vite! Fermez votre porte! Votre regard me brûle. 
Je ne supporte par votre regard.

La Saisie des Meubles 

(La maison du père. Les huissiers saisissent 
les meubles) 

AVENANT 
Ils emportent tout.

LUDOVIC 
Tu verras qu'ils ne laisseront même pas cette table.

AVENANT 
Jouons.

USURIER
Allez chez votre père. Il n'y comprend rien. 
Mais ce n'est pas à moi de lui dire la vérité.

AVENANT 
Vas-y.

(A l'étage de la maison. Le père au lit, est souffrant) 

LE PERE 
Ah!...
Ludovic. Ludovic, avoue.

LUDOVIC 
A vrai dire, j'avoue.

LE PERE 
Tu as fais cela!

(De nouveau au rez-de-chaussée) 

AVENANT 
Monsieur, cet homme est très malade. 
Vous allez lui laisser son lit.

USURIER
Ah, oui, les lits, on les laisse.

LUDOVIC 
Je te parie qu'on ne vide pas leurs chambres...

USURIER
J'ai une garantie pour vos soeurs.

La Confiance de La Bête en La Belle 

(Au château. La Belle est au lit) 

LA BETE 
Belle. Vous êtes malade?

LA BELLE
Oui, la Bête, je suis malade.

LA BETE 
Qu'avez-vous?

LA BELLE
Mon père est mourant.

LA BETE 
Je ne supporte pas de vous voir malade.

LA BELLE
Renvoyez-moi chez mon père!

LA BETE 
Si j'accepte, pouvez-vous me jurer de revenir 
dans une semaine, jour pour jour?

LA BELLE
Je vous le jure.

LA BETE 
Venez, la Belle.

(Il la conduit au balcon) 

Regardez, la Belle, vous voyez ce pavillon. 
On l'appelle "Pavillon de Diane". C'est le seul endroit
du domaine où nul ne peut entrer, ni vous, ni moi.
Tout ce que je possède, je le possède par magie.
Mais dans ce pavillon se trouvent mes richesses 
véritables. On y pénètre avec une clef d'or. La voilà.
Belle, je vous donne la plus grande preuve de confiance 
qui se puisse donner au monde. 
Si vous ne revenez pas, je mourrai. 
Après ma mort, vous ne risquerez plus rien, 
toutes mes richesses seront à vous. 
Prenez cette clef, la Belle, je connais votre âme. 
Cette clef, remise entre vois mains, 
sera le gage de votre retour.

LA BELLE
Vous consentez à m'envoyer chez mon père?

LA BETE 
Vous y serez ce matin-même. 
Ma nuit n'est pas la vôtre. 
Il fait nuit chez moi. C'est le matin chez vous.
Belle , une rose qui a joué son rôle, mon miroir, 
ma clef d'or, mon cheval et mon gant 
sont les cinq secrets de ma puissance. Je vous les livre.
Il vous suffira de mettre ce gant à votre main droite;
il vous transportera où vous désirez être.
Souvenez-vous de votre promesse.
Adieu, la Belle.

Belle Retourne Chez son Père 

(La Belle met les gants et se trouve transportée dans 
la chambre de son père) 

LE PERE 
Je rêve!

LA BELLE
Non, mon père, vous ne rêvez pas. 
C'est Belle qui vous parle.

LE PERE 
Je te croyais morte. Tu as pu prendre la fuite?

LA BELLE
Non, mon père, on m'a laissée vous voir.

LE PERE 
Ce monstre a donc une âme?

LA BELLE
Il souffre, mon père. 
Une moitié de lui est en lutte contre l'autre.

LE PERE 
Belle, je l'ai vu. Sa tête est atroce.

LA BELLE
D'abord il fait bien peur, mon père. Mais alors, 
je vois ses yeux si tristes, 
que je détourne les miens pour ne pas pleurer.

LE PERE 
Belle, tu ne me dis pas que tu acceptes ce monstre!

LA BELLE
Il le faut. Certaines forces lui obéissent. 
Certaines forces le commandent. Si je m'échappais, 
je commettrais un crime envers lui, et envers vous.

LE PERE 
Est-ce qu'il te menace?

LA BELLE
Il ne m'apparaît qu'aux heures 
où sa cruauté n'est pas à craindre. 
Parfois, il a une démarche royale. 
Il semble victime de quelque infirmité.

LE PERE 
Tu trouves le moyen de la plaindre?

LA BELLE
Je serais heureuse si j'arrivais à lui faire oublier sa laideur.

LE PERE 
Belle, Belle, il t'en coûtera d'être bonne...

LA BELLE
Mon père, ce monstre est bon.

(La Belle verse une larme, qui se transforme
en diamant) 

LE PERE 
Dieu du ciel, un diamant! Un autre!

LA BELLE
C'est la preuve que les fées le protègent, 
car j'ai pleuré en pensant à lui.

LE PERE 
Ces diamants sont peut-être du diable.

LA BELLE
Rassurez-vous, mon père, et gardez-les. 
Ils vous feront vivre. Si vous racontez à mes soeurs, 
il ne vous en restera rien...

Belle Raconte son Histoire 

(Dans la cour. Adélaïde et Félicie étendent le linge,
Ludovic donne à manger au poules et Avenant coupe 
du bois) 

FELICIE 
J'ai les mains dans un état! Regarde!

LUDOVIC 
C'est atroce!

ADELAIDE
Regarde les miennes. Une Cuisinière!

LUDOVIC 
Les belles princesses! 
Quand on n'a plus le sou, on travaille!

ADELAIDE
Quel crétin!

FELICIE 
Tu peux parler fripouille! Sans le coup des meubles,
nous aurions encore une servante.

AVENANT 
C'est ma faute. 
Je vous prie de constater que je paie de ma personne.

ADELAIDE
Quand vous n'êtes pas en train de boire 
et de jouer au dés!

AVENANT 
Vous êtes charmantes!
Comment allait votre père?

LUDOVIC 
Si tu crois qu'elles s'en occupent!
C'est moi qui le soigne. 
Il est encore très faible, il ne peut se tenir debout.

LE PERE 
Félicie! Adélaïde! Ludovic!

FELICIE 
Ça, par exemple!
Une dame de la cour! 
Et mon père debout!

ADELAIDE
Et nous voilà sans robe!

AVENANT 
Mais c'est la Belle!

LUDOVIC 
La Belle! C'est impossible!

FELICIE 
Si! 

(S'adressant à Avenant) 

Oh, vous! Laissez-moi tranquille.

AVENANT 
De plus en plus charmante!

LE PERE 
Belle est entrée dans ma chambre.

LUDOVIC 
(S'adressant à Belle)
Mais d'où sors-tu?

FELICIE 
Quel collier magnifique!

LA BELLE
Prends-le, Félicie, sur toi il sera bien plus magnifique!

(Alors que Félicie prend le collier, il se transforme 
en une loque repoussante) 

AVENANT 
Dieu!

ADELAIDE
Laisse-ça tout de suite. Quelle horreur!

LE PERE 
Ce que la Bête t'a offert est à toi. 
Il ne faut le donner à personne.

FELICIE 
Viens, Adélaïde, allons nous vêtir. 
De quoi aurions-nous l'air?

LUDOVIC 
Au revoir, amusantes petites!

(Les deux soeurs quittent la cour) 

LA BELLE
Qui a fait ma lessive?

AVENANT 
C'est nous!

LA BELLE
Les draps traînent par terre.

LUDOVIC 
Alors, cette bête n'était pas féroce?

LA BELLE
Non, c'est une bonne bête.

AVENANT 
Vous n'allez pas retournes?

LA BELLE
Si Avenant, j'ai promis. La Bête m'a laissée libre, 
et si je ne rentrais pas, elle en mourrait de douleur.

AVENANT 
Vous l'aimez?

LA BELLE
Non, Avenant. Je l'aime... bien. 
Ce n'est pas pareil.

(Dans la maison) 

ADELAIDE
Le tribunal d'église s'intéresserait beaucoup 
au phénomène dont nous venons d'être témoins.

(Dans la cour) 

LA BELLE
(S'adressant à son père)
A tout à l'heure.

LUDOVIC 
Allons dans la remise où elles ne peuvent pas 
nous entendre. Raconte!

LA BELLE
Il m'a confié la clef de son trésor. 
Sa confiance en moi est complète. 
C'est moi qui serais le monstre si je ne revenais pas.

LUDOVIC 
Quels sont les domestiques? En as-tu beaucoup?

LA BELLE
Ce sont des mains invisibles qui m'habillent, 
qui me coiffent, qui ouvrent et ferment les portes. 
Je ne vois jamais personne.

AVENANT 
Et cette bête parle le langage des hommes?

LA BELLE
Oui. Elle parle comme vous et moi.

LUDOVIC 
Est-ce qu'elle marche à quatre pattes? 
Qu'est-ce qu'elle mange?

LA BELLE
Il m'arrive de lui donner à boire... 
et elle ne me mangera pas!

Le Plan 

(Dans la maison) 

FELICIE 
Tu te rends compte?

ADELAIDE
C'est incroyable!

FELICIE 
Cette petite sotte est plus heureuse que nous. 
Elle est riche. Il y a bien d'autres maris 
qui portent du poil et des cornes.

ADELAIDE
Elle crève d'orgueil.

FELICIE 
Tranquillise-toi. J'ai la tête sur les épaules.
Soyons très aimables et laissons les garçons 
lui tirer les vers du nez.

(A la taverne) 

AVENANT 
Montre ta fortune.

LUDOVIC 
Voilà. C'est effrayant!

AVENANT 
Il faut agir. J'ai décidé quelque chose.

LUDOVIC 
Plus rien à faire.

AVENANT 
Ludovic... 
L'idée de voir Belle retourner demain 
chez cette Bête est intolérable. 
Nous devons tuer la Bête.

LUDOVIC 
Et prendre ses richesses. 
Mais, tu sais ce que c'est qu'une puissance magique?

AVENANT 
Je ne crois pas aux puissances magiques. 
Le monstre endort la Belle 
et lui fait croire ce qu'il veut...

LUDOVIC 
J'ai peur.

AVENANT 
S'il s'agit de délivrer la Belle, 
moi je n'ai peur d'aucune puissance au monde. 
Flatte tes soeurs. 
Si elles y trouvent leur intérêt, 
elles empêcheront Belle de partir.

LUDOVIC 
Et, par quel miracle te rendras-tu chez la Bête?

AVENANT 
J'interrogerai la Belle et je lui arracherai son secret.

(Plus tard. Dans la cuisine) 

FELICIE 
Nous nous frotterons les yeux 
avec des oignons et nous pleurerons.

ADELAIDE
Elle sentira cette ignoble odeur.

FELICIE 
La souillon est bien trop stupide pour s'en apercevoir. 
L'idée de Ludovic n'est pas si sotte.
Laisse-moi faire. Charmant! Allez, vas-y, vas-y...

(Elles entrent dans la chambre de la Belle tout en
tenant leurs mouchoirs au visage) 

Oh! Belle reste avec nous.
Nous avons été souvent bien injustes...

ADELAIDE
Mais à la minute de te perdre...

FELICIE 
Nous venons de comprendre combien nous t'aimons.

LA BELLE
Vous pleurez?

FELICIE 
Si cette Bête t'aime, elle ne t'en voudra pas 
de prolonger ton séjour.

LA BELLE
C'est impossible!

FELICIE 
Tu veux donc tuer de chagrin ton père et tes soeurs.
Belle, reste. 
Reste, Belle, reste avec nous!

LA BELLE
Je ne peux pas.

FELICIE 
Ne sois pas méchante. Reste.

LA BELLE
Adélaïde, Adélaïde, ma petit soeur!

FELICIE 
Adélaïde me disait "je découvre notre Belle, 
et je mourrai si elle nous quitte".

LA BELLE
Ne me tentez pas...

FELICIE 
Ne nous abandonne pas demain! 
Tu expliqueras à la Bête que c'est la faute de tes soeurs.

(Elle aperçoit la clef d'or posée sur la commode, et la 
prend à l'insu de la Belle) 

LA BELLE
Je ne savais que vous m'aimiez tant.

FELICIE 
Belle, tu es un ange!

ADELAIDE
Nous sommes contentes! Contentes!

(Belle se jette sur le lit. Ses soeurs quittent la pièce) 

Elle pleure.

FELICIE 
Elle restera, et nous partagerons les trésors.

ADELAIDE
Allons nous laver. Tu empestes!

(Elles rencontrent Ludovic sur le palier) 

LUDOVIC 
Alors?

FELICIE 
Alors, quoi?

LUDOVIC 
Elle reste?

FELICIE 
Elle reste.

LUDOVIC 
Tu as la clef?

FELICIE 
Regarde!

LUDOVIC 
Donne.

FELICIE 
Pour qui me prends-tu?

ADELAIDE
Dieu sait l'usage que tu en ferais.

LUDOVIC 
Pauvre idiote!

FELICIE 
Je donnerai cette clef à Avenant s'il se décide à partir.

LUDOVIC 
Vous êtes fantastiques. Partir comment? Partir pour où?

FELICIE 
Mais qu'Avenant se débrouille!

La Passion D'avenant 

(Repas de famille. Belle sert le dîner) 

LE PERE 
Belle, tu as l'air tout triste.

LA BELLE
Non, mon père.

FELICIE 
Elle regrette son luxe, 
et notre médiocrité la dégoûte.

LE PERE 
Félicie! Félicie!

ADELAIDE
La Bête devait avoir des charmes 
que nous ne possédons pas!

LE PERE 
Ah!

FELICIE 
Mademoiselle estime sans doute 
qu'il n'est plus de son rang de servir à table.

(La Belle se précipite hors de la pièce) 

LE PERE 
Belle! Belle!

(Avenant l'attend dehors) 

AVENANT 
Qu'est-ce qu'on vous a encore fait? Ce sont vos soeurs? 
Elles n'ont pas été longues. Quelle misère!
Belle, écoutez-moi, ne pleurez plus. 
Il faut que je vous réveille de ce cauchemar... 
Il faut que je vous emporte! Je sais à quoi vous pensez. 
Je suis un chenapan. Auprès de vous, je travaillerai. 
Nous quitterons les tavernes. Répondez... 
Qu'avez-vous? Je vois, c'est la Bête. 
Dites-moi le secret qui vous permet de la rejoindre. 
J'irai, je la tuerai. Ne répondez pas... Je m'en doutais. 
La Bête exerce sur vous quelque charme, 
du moins, votre coeur que je connais, 
ne peut se résoudre à lui vouloir du mal.
Belle, laissez-moi vous le dire, 
ce monstre ne souffre pas. 
S'il souffrait comme je souffre, 
il volerait à votre rencontre, 
et il vous obligerait à le suivre. 
Rassurez- vous, il vous a oubliée...

(Au château. La Bête attend anxieusement le retour 
de la Belle) 

Le Magnifique Apparaît 

(Dans la cour) 

FELICIE 
Entrez vite. Ici on risque pas d'être découverts.

ADELAIDE
Naturellement, vous êtes en retard.

FELICIE 
Alors?

AVENANT 
Ma décision est prise Je ne reculerai plus.

LUDOVIC 
Mais comment irons-nous chez la Bête?

FELICIE 
Vous n'avez pas pu appendre comment Belle voyage?

AVENANT 
Belle dit ce que la Bête lui fait dire. 
Mais elle reste muette là-dessus.

FELICIE 
Au diable. Je la tourmenterai jusqu'à ce qu'elle parle.

AVENANT 
Si vous la tourmentez, ne comptez plus sur moi.
Qu'est-ce que c'est? Je vais voir.
Un cheval blanc. Tout seul. 
C'est Le Magnifique, j'en suis sûr. 
Il a ouvert la barrière, il est entré dans la cour.

FELICIE 
C'est le ciel qui l'envoie.

LUDOVIC 
C'est l'enfer...

ADELAIDE
J'ai peur!

FELICIE 
Oh, tais-toi, idiote! 
Avenant, ouvrez la porte et amenez le cheval.

LUDOVIC 
Que personne n'y aille!

AVENANT 
J'y vais, moi.

FELICIE 
La Bête l'envoie chercher la Belle. 
Avenant, c'est vous et Ludovic 
que le cheval emmènera.

LUDOVIC 
Tu en parles à ton aise.

FELICIE 
Es-tu un homme?

LUDOVIC 
Mais je voudrais t'y voir.

AVENANT 
Inutile de perdre une minute.
Allez, hop, Ludovic, en croupe.

LUDOVIC 
Dieu nous garde!

FELICIE 
Vos arcs!

(Un sac pend à la selle) 

AVENANT 
Qu'est-ce qui me gêne?

FELICIE 
Un sac. 
Si c'était de l'or, je n'aurais qu'à le toucher 
pour qu'il se change en paille. Ouvrez-le.

ADELAIDE
Un miroir!

FELICIE 
Ce qui veut dire: regardez une fille 
qui manque à ses promesses.

LUDOVIC 
La Bête n'est pas si bête que cela.

FELICIE 
Tenez, la clef. En route, et bonne chance.

AVENANT 
J'ai oublié la formule.

LUDOVIC 
C'est quelque chose comme... va, va, va.

FELICIE 
Si je devais ne compter que sur vous, 
nous serions propres. 
"Va où je vais, Le Magnifique, va, va, va".

AVENANT 
Va où je vais, Le Magnifique, va, va, va.

ADELAIDE
Ludovic!

FELICIE 
Mais qu'est-ce que tu as?

ADELAIDE
Si nous les envoyons à la mort?

FELICIE 
Tu es folle.
Le miroir!

Le Miroir 

(Les deux soeurs rentrent dans la maison) 

ADELAIDE
Je ne me sens pas à mon aise.

FELICIE 
(Dirigeant le miroir vers sa soeur)
Regarde-toi, tu es verte.

ADELAIDE
(En effet, elle se voit sous les traits d'une vieillarde)
Oh!

(A son tour, elle dirige le miroir vers sa soeur qui se 
voit sous les traits d'un singe) 

Regarde.

FELICIE 
Oh!

ADELAIDE
Qu'est-ce que tu vois?

FELICIE 
Rien.
Portons-le à Belle. Chacune son tour.

(Elles entrent dans la chambre de Belle) 

Mademoiselle s'habille en princesse 
dès qu'elle se croit seule dans sa chambre.

ADELAIDE
Pour qui me prends-tu?

FELICIE 
Voilà un miroir qu'on a déposé 
à ton nom devant la porte. 
Il te montrera ce que doit devenir 
une belle pour plaire à une bête!

(Belle tient le miroir et découvre l'image de la Bête 
qui semble souffrir intensément. Elle enfile le gant 
et se trouve transportée au château) 

LA BELLE
Oh! La clef! Oh, la clef!
Où est la clef?
Mon Dieu!
Ma Bête! Ma Bête! Ma Bête! Ma Bête! Ma Bête!

(Elle trouve la Bête gisant sur le sol) 

Répondez-moi, ma Bête! Ma Bête! Ma Bête! Ma Bête!
Ma Bête! pardon...
Répondez moi ma Bête... Regardez-moi! 
Votre gant vous fera vivre!
Aidez-moi! C'était moi le monstre, ma Bête...
Vous vivrez!

LA BETE 
Trop tard...

Le Pavillon 

(Ludovic et Avenant rodent autour du pavillon) 

LUDOVIC 
Nous y sommes?

AVENANT 
Nous y sommes. 
Il faut d'abord tuer la Bête.

LUDOVIC 
Nous la tuerons après.
Tu as la clef? Arrête! 
Cette clef peut déclencher quelque méchant mécanisme. 
Méfions-nous.

AVENANT 
Exact, nous n'entrerons pas par la porte. Suis-moi.
Grimpe!
Allons, du courage. Naturellement, tu as peur.

LUDOVIC 
J'ai pas peur, je réfléchis.

AVENANT 
Alors, tu montes?

LUDOVIC 
Où sommes-nous?

AVENANT 
Sur les vitrages. Regarde!

(Ils aperçoivent un trésor en bas du pavillon) 

LUDOVIC 
C'est fantastique!
Et ça, qu'est-ce que c'est?

AVENANT 
Diane!

(Pendant ce temps, la Belle s'efforce désespérément 
de raviver la Bête) 

LA BELLE
Seriez-vous lâche. Je connais vos griffes puissantes.
Accrochez-les dans la vie. Défendez-vous! 
Effrayez la mort.

LA BETE 
Belle, si j'étais un homme, 
sans doute je ferais les choses que vous me dites. 
Mais les pauvres bêtes qui veulent prouver 
leur amour ne savent que se coucher par terre et mourir.

AVENANT 
(Sur le toit du pavillon)
Je vais casser les carreaux.

LUDOVIC 
Non!

AVENANT 
Du verre c'est du verre. 
Tu me tiendras de toutes tes forces par les mains. 
Et je saute.

LUDOVIC 
C'est trop haut.

AVENANT 
Je saute!

LUDOVIC 
Et pour sortir le trésor?

AVENANT 
On se débrouillera. Le principal est d'être dans la place. 
Cale-toi bien. Empoigne-moi fort.
Attends. Attends un peu! 
Tu me lâcheras quand je te le dirai...

(La statue de Diane tire une flèche sur Avenant) 

Oh!

(Avenant se transforme en la Bête. Sa chute au sol lui
est fatale. A cet instant précis, la Bête se transforme en 
prince charmant) 

LA BELLE
Où est la Bête?

La Métamorphose 

ARDENT
La Bête n'est plus, c'était moi, Belle. 
Mes parents ne croyaient pas aux fées, 
elles les ont punis en ma personne. 
Je ne pouvais être sauvé que par un regard d'amour.

LA BELLE
De pareils prodiges sont-ils possibles?

ARDENT
Nous en sommes la preuve. 
L'amour peut faire qu'un homme devienne bête. 
L'amour peut faire aussi 
qu'un homme laid devienne beau. 
Qu'avez-vous, Belle? 
On dirait que vous regrettez ma laideur.

LA BELLE
Ce n'est pas cela, Monseigneur, 
mais vous ressemblez à quelqu'un que j'ai connu.

ARDENT
Qui donc?

LA BELLE
L'ami de mon frère.

ARDENT
Vous l'aimiez?

LA BELLE
Oui.

ARDENT
Le savait-il?

LA BELLE
Non.

ARDENT
Mais vous aimiez la Bête.

LA BELLE
Oui!

ARDENT
Vous êtes une drôle de petite fille, Belle... 
une drôle de petite fille.

LA BELLE
Pour vous servir.

ARDENT
Il vous déplaît que je ressemble 
à cet ami de votre frère?

LA BELLE
Oui...
Non.

ARDENT
La première fois que je vous ai portée dans mes bras,
j'étais la Bête. Vous êtes heureuse?

LA BELLE
Il faudra que je m'habitue. 
Où me conduisez-vous?

ARDENT
Dans mon royaume où vous serez une grande reine.
Vous y retrouverez votre père, 
et vos soeurs porteront la traîne de votre robe.

LA BELLE
Est-ce très loin?

ARDENT
Nous y volerons dans les airs. Vous n'aurez pas peur?

LA BELLE
J'aime avoir peur... avec vous!

ARDENT
Belle! Je vous emporte. En route!

(Ils s'envolent ensemble à travers les nuages)



OBERTURA 


Las Hermanas 

(Ludovic y Avenant disparan flechas apuntando a 
una diana fijada en los muros de la casa. Felicie 
y Adelaida están en el interior) 

ADELAIDA
¡Oh, ésa!... No sabe hacer nada.

LUDOVIC
¡Mala!... ¡Tu pie!

AVENANT
¿Qué pasa con mi pie?

LUDOVIC
Haces trampas, no está sobre la línea.

(Avenant lanza. La flecha pasa a través de la 
ventana, rozando al perro de las dos hermanas) 

ADELAIDA
¡Oh, mi vestido!

FELICIE
Pero ¿qué te pasa?

ADELAIDA
¡Han tirado una flecha en la habitación!

FELICIE
¡Pedazo de granujas! 
¡Podíais habernos saltado un ojo!

AVENANT
¿Bella, está bien? 

ADELAIDA
¡Bella, siempre Bella!... Sólo os importa Bella. 
¡Casi matáis a Cabriola!

LUDOVIC
Ahí vienen. 

FELICIE
Bella, limpia el suelo o llegaremos tarde 
a casa de la Duquesa.

ADELAIDA
¡Asesinos¡ 

LUDOVIC
Mis hermanas son unas mujerzuelas.

FELICIE
Beber... Perseguir a las chicas...
Se burlan de todo lo demás.

LUDOVIC
Cuando no se tiene dinero, 
hay que quedarse en casa, a hacer la colada...
¡Pero no! Mira estas zorras que no se dan cuenta 
de que todos se ríen en sus narices...

ADELAIDA
Pero dile algo... 

FELICIE
Estará contento.

LUDOVIC
¡Oh, qué bellas! ¡Oh, qué bellas son!

ADELAIDA
Démonos prisa o llegaremos tarde al concierto.

LUDOVIC
¡Oh, qué encantadoras, qué divinas!

ADELAIDA
¡Lacayos!

LUDOVIC
(Imitándola) 
¡Lacayos! 

ADELAIDA
¡Lacayos!

FELICIE
(Encontrando al lacayo dormido sobre la silla 
de manos) 
¡Oh!... ¡Es increíble!

ADELAIDA
¿Acaso os pagamos para dormir?
¡Jamás había visto nada parecido!
¡Oh!... Estas sillas... ¡están asquerosas!

FELICIE
¡Lacayos, lacayos!

ADELAIDA
¡Rápido, rápido, daos prisa!

LACAYO
¡Venga, nos vamos!

ADELAIDA
Por debajo de la escalera no.

FELICIE
¡Os arrastráis! Vais dormidos... ¡Habéis bebido! 

ADELAIDA
¡Mira ese borrachín que no sabe comportarse!

FELICIE
Es un haragán no vale para nada.

ADELAIDA
¡Ah, seguro que han bebido, han bebido!

LUDOVIC
¡Vamos, vamos, vamos!... 
¡Que el diablo os salpique y os cubra de estiércol!

La Petición de Mano de Avenant 

(Bella está fregando el suelo) 

AVENANT
Bella, no estáis hecha para ser una sirvienta; 
hasta el mismo suelo quiere ser vuestro espejo. 
No podéis seguir trabajando noche y día.

BELLA
Si los barcos de nuestro padre 
no se hubiesen perdido en la tempestad... 
Pero estamos arruinados...

AVENANT
Me pregunto por qué no son 
vuestras hermanas las que trabajan.

BELLA
Mis hermanas son demasiado bellas, 
tienen las manos muy blancas...

AVENANT
Bella. Vos sois la más hermosa. 
Mirad vuestras manos...

BELLA
Dejad mis manos, 
y retiraos para que acabe mi trabajo.

AVENANT
¡Os amo!... ¡Casaos conmigo!

BELLA
No, Avenant. No me habléis de eso...
Es inútil.

AVENANT
Os desagrado...

BELLA
No, Avenant.

AVENANT
¿Entonces?

BELLA
Quiero quedarme soltera y vivir con mi padre.

AVENANT
Bella, os sacaré a la fuerza de esta estúpida vida. 

BELLA
¡Dejadme!

LUDOVIC
(Ludovic entra en la habitación) 
¡Aparta tus garras!...
¿Quieres que te parta la boca?

BELLA
¡Déjale, Ludovic!...
Avenant me pedía en matrimonio.

LUDOVIC
¿Qué le has contestado?

AVENANT
Me ha rechazado.

LUDOVIC
¡Bravo, Bella! 
Soy un tunante, lo admito, 
pero no soportaría ver cómo te casas con otro. 
Que quede dicho...
¡Vamos, desalmado, lárgate de aquí!

(Avenant golpea a Ludovic) 

BELLA
¡Ah! ¡Avenant, estáis loco! ¡Ludovic, Ludovic!...

(El padre entra en la casa en compañía de tres 
hombres) 

PADRE
¡Pasad, caballeros! Quiero que estéis presentes 
cuando anuncie la gran noticia.

BELLA
¡Mi padre!... ¡Que no se entere de nada!

PADRE
Mis hijas han ido al mundo de los grandes, 
donde las halagan. No las esperaré...
Ven a mi lado, Bella. Acércate, Ludovic. 
Y tú también, Avenant. No estás de más... 
Estos caballeros perdonarán vuestras travesuras. 
¡Vamos a ser ricos!...
¡Uno de mis barcos ha llegado a puerto! 

LUDOVIC
Avenant lo sabía.

BELLA
¡Ludovic!

LUDOVIC
Y ha aprovechado para pedir la mano de Bella.

BELLA
¡No es la primera vez que me la pide,
estando en la ruina!

PADRE
¿Vas a dejarme?

BELLA
¡No, padre, no os dejaré jamás!

(Adelaida y Felicie entran) 

FELICIE
Nos han dicho que la duquesa no podía recibirnos. 
Recogemos así el fruto de vuestras necedades. 

ADELAIDA
Podéis estar orgulloso. 

FELICIE
Invitáis a la gente a beber 
mientras insultan a vuestras hijas. 

PADRE
¡Mis pequeñas!
La duquesa me parecía una mujer educada. 

ADELAIDA
¡Menuda vergüenza!

FELICIE
¡Vamos, Adelaida, dejemos que brinden por nuestra desgracia! 

BELLA
Padre, padre...

PADRE
Son unos auténticos demonios, 
pero muy pronto se consolarán. 
Mañana iré al puerto a arreglar nuestros asuntos. 
Caballeros...

El Viaje del Padre 

(A la mañana siguiente, el padre se dispone a 
salir hacia el puerto) 

ADELAIDA
¡Traednos vestidos con brocados,
y joyas y plumas de avestruz!...

FELICIE
Para que toda la ciudad se muera de envidia. 
¡Y un mono!... ¡Yo quiero tener un mono! 

ADELAIDA
¡Yo un loro!

PADRE
Y a ti, Bella. ¿qué te traigo?

BELLA
Padre mío, traedme una rosa. 
Pues aquí no crecen...

(Adelaida y Felicie estallan de risa. Más tarde,
en la taberna. Avenant y Ludovic están bebiendo) 

LUDOVIC
Si no pago mi deuda esta noche, 
me meterán en prisión.

AVENANT
El usurero lo comprenderá rápido. 
Ya le conté la situación... ¡Ahí viene!

USURERO
Es una suma muy, muy grande...

AVENANT
Uno de los barcos perdidos ha regresado a puerto.

LUDOVIC
Os lo devolveré tras el regreso de mi padre.

USURERO
Conocéis la ley. Si sois insolvente, 
le reclamaré la suma a vuestro padre. 
Si vuestro padre es insolvente, 
le embargaré sus bienes.

AVENANT
Firma... ¿Qué puedes arriesgar?

(En el despacho del oficial del puerto) 

OFICIAL
Caballero ¿y qué quiere que yo haga?

PADRE
Pero si no me queda nada de este último barco, 
¿qué va a ser de mí?

OFICIAL
Vuestros acreedores del puerto han sido 
más rápidos que los de la ciudad. Poned un pleito.

PADRE
¿Un pleito?... ¡Pero si no tengo ni para pagar 
una posada en el puerto!

OFICIAL
Pues, volved a casa.

PADRE
Pero... tendré que cruzar el bosque, ¡me perderé!

OFICIAL
Ya lo habéis cruzado otras veces.

PADRE
Había luna llena y.... ahora hay niebla. 
Voy a perderme.

OFICIAL
Pues, ¡perderos! 

PADRE
¡Me gustaría veros en mi lugar! ¡Es espantoso!

OFICIAL
¡Buenas noches!... ¡Y buen viaje!

(Perdido en el bosque, el padre llega a un castillo 
en el que las puertas se abren a su paso) 

PADRE
¿Hay alguien?
¿Hay alguien aquí?

Los Dominios de la Bestia 

(Entra en el castillo) 

¿Hay alguien?

(El comedor del castillo. Manos invisibles le 
sirven comida, después se duerme. Cuando
despierta, se dispone a abandonar el castillo)

BESTIA
¡Hola!
¡Hola!... 

(El padre descubre una preciosa rosa y 
termina cogiéndola) 

¡Vaya, vaya, caballero! Así que robáis mis rosas... 
Robáis mis rosas que son 
lo que más quiero en este mundo. 
Tenéis mala suerte, porque en mi casa 
podíais tomarlo todo menos mis rosas. 
Creo que este simple robo, merece la muerte.

PADRE
Mi señor, no lo sabía. 
No creí ofender a nadie 
por coger esta rosa para mi hija.

BESTIA
No me llaméis "Mi señor", llamadme "La Bestia"
No me gustan los cumplidos. 
No esperéis clemencia. 
Disponéis de un cuarto de hora
para preparaos a morir.

PADRE
Mi señor...

BESTIA
¡Otra vez! 
La Bestia os ordena que guardéis silencio. 
¡Habéis robado mis rosas y moriréis! 
A menos... que una de vuestras hijas...
¿Cuántas tenéis?

PADRE
Tres.

BESTIA
A menos que una de vuestras hijas acceda 
a pagar por vos, y ocupe vuestro lugar.

PADRE
Pero...

BESTIA
No pienso discutir. ¡Marchaos! 
Aprovechad la oportunidad que os concedo. 
Y si vuestras hijas se niegan a morir en vuestro 
lugar, jurad que volveréis dentro de tres días.

PADRE
Lo juro... 
Pero tendría que encontrar el camino...
Me he perdido en el bosque.

BESTIA
Encontraréis en mis establos un caballo blanco. 
Su nombre es Magnífico. 
Sólo hay que decirle al oído: 
"Ve a donde yo voy, Magnífico, ve, ve, ve". 
Os llevará a vuestra casa, y volverá a traeros 
al castillo si vuestras hijas son demasiado cobardes 
para montarlo en vuestro lugar. 
¡Marchaos!

El Regreso del Padre 

(casa del padre)

PADRE
No sé si este viaje ha sido corto o interminable. 
Magnífico está en nuestro establo. 
Ésta es toda la historia. 
Bella, toma esta rosa, me ha costado muy cara.

FELICIE
Esto es lo que pasa cuando una necia 
pide que le traigan rosas.

ADELAIDA
Y que quiere hacerse la modosita
y darnos lecciones... Ni siquiera llora.

BELLA
No moriréis, padre, es culpa mía. 
¡Es justo que vaya yo en su lugar! 

AVENANT
Iré con Ludovic. 
Y mataremos a esa espantosa bestia.

PADRE
El poder de esa bestia es tan grande 
que no tenemos ninguna esperanza. 
Quédate tranquila, Bella. 
Yo soy viejo, lo prometí, iré yo.

BELLA
Vos no iréis, padre. 
Todavía podéis ganar vuestro pleito.

ADELAIDA
¿Cómo vamos a vivir?

PADRE
Podéis vender mis muebles.

LUDOVIC
¿Porqué no vas tú, Felicie? 
Eres demasiado correosa para que te coman.

FELICIE
Es una lástima que esa bestia 
no reclame muchachos.

PADRE
¡Hijos míos! Calma.

BELLA
Padre mío. Prefiero que me devore ese monstruo 
que morir de pena por vuestra pérdida.

AVENANT
Vos no iréis con el monstruo.

FELICIE
¿Por qué os entrometéis?

AVENANT
¡Yo me meto en lo que place!

ADELAIDA
¿Estáis enamorado de esta idiota? 
Bonita pareja hacéis.

LUDOVIC
¡Avenant, no lo consientas!

PADRE
¡Calma, calma!

AVENANT
¡Repetid, repetid lo que acabáis de decir!

FELICIE
¡Una idiota y un imbécil!...
¡Me ha pegado!

ADELAIDA
¡Granuja! ¡Canalla!

LUDOVIC
¿Te atreves a abofetear a mi hermana?

AVENANT
Y si quieres, también tengo otra para ti.

ADELAIDA
¡Tramposo! ¡Ladrón!

PADRE
¡Hijos míos!... ¡Hijos míos!

BELLA
Ludovic, mi padre se encuentra mal.

AVENANT
¡Llevémosle a su habitación!

(Avenant, Ludovic y Bella llevan al padre hasta 
su habitación) 

FELICIE
¡Me ha golpeado, Adelaida!

ADELAIDA
¡Y no tenemos dinero!

FELICIE
No desesperemos...
¡La Bestia los devorará a todos! 
Y nosotras nos casaremos con un príncipe.

La Bella va al Castillo 

(La Bella monta en el caballo blanco) 

BELLA
¡Ve a donde yo voy, Magnífico, ve, ve, ve!

(La Bella llega al castillo. Voces extrañas 
le hablan) 

BESTIA
Bella, soy la puerta de vuestra habitación.
Soy vuestro espejo, Bella. 
Miraos en mí, yo me reflejaré en vos.

BELLA
¡Oh!

(La Bella sale fuera y aparece la Bestia) 

BESTIA
¿A dónde vais?

BELLA
(Desmayándose) 
¡Oh!

(La Bestia acuesta a Bella. Ella se despierta) 

BESTIA
Bella, nunca debéis mirarme a los ojos. 
No temáis, no me veréis en todo el día, 
salvo cada tarde, a las siete. 
Cuando vos cenéis, yo me acercaré al salón. 
Nunca debéis mirarme a los ojos.

La Cena 

(En el comedor del castillo. Bella está sentada 
a la mesa cuando aparece la Bestia) 

BESTIA
No tengáis miedo.

BELLA
Yo... no tengo miedo.

BESTIA
¿Aceptaríais que os mirara mientras cenáis?

BELLA
Vos sois el amo.

BESTIA
¡No, aquí no hay mas amo que vos!
Os repugno.
Me encontráis horrible.

BELLA
Yo no sé mentir, Bestia.

BESTIA
¿Está todo a vuestro gusto, aquí?

BELLA
No me encuentro muy a gusto entre tanto lujo...
Pero adivino que tratáis 
de hacerme olvidar vuestra fealdad.

BESTIA
Mi corazón es bueno, pero soy un monstruo.

BELLA
Hay muchos hombres más monstruosos que vos, 
y que lo ocultan.

BESTIA
Además de feo, no tengo ingenio.

BELLA
Tenéis el suficiente como para daros cuenta.

BESTIA
Todo lo que hay en este castillo os pertenece...
Expresad vuestros más mínimos caprichos. 
Apareceré cada tarde a las siete 
y os haré una pregunta, siempre la misma.

BELLA
¿Cuál es esa pregunta?

BESTIA
Bella, ¿querríais ser mi esposa?

BELLA
¡No, Bestia!

BESTIA
Entonces adiós, Bella... ¡Hasta mañana!

Los Tormentos de La Bestia 

(La Bestia busca a Bella en vano, después entra 
en su habitación) 

BESTIA
¿Dónde estáis Bella?... ¿Dónde estáis Bella?

(La Bella entra en la habitación) 

BELLA
¿Qué hacéis en mi habitación?

BESTIA
He venido a vuestra habitación 
para traeros un regalo.

BELLA
¡Marchaos!... ¡Fuera!

Paseo por el Jardín 

(La Bella pasea por el jardín y ve como la 
Bestia bebe a lengüetazos agua de un estanque. 
La Bestia va a su encuentro) 

BESTIA
Creía que estaríais cenando.

BELLA
Prefiero pasear con vos.

BESTIA
Es un gran privilegio el que me concedéis. 
Un gran privilegio.

BELLA
Tenéis la voz más dulce.

BESTIA
Bella, ¿No os aburrís durante todo el día?

BELLA
Los días se me hacen largos...
Reconozco que ansiaba que dieran las siete.

BESTIA
Cuando os veo tan afable, me gustaría haceros la 
pregunta que me atormenta y tanto daño me hace.

BELLA
Hacedla, pero yo responderé de la misma manera. 
Seamos amigos, Bestia, no me pidáis nada más...
Y vos, ¿qué hacéis durante todo el día? 

(El ruido de un ciervo que atraviesa por el 
bosque distrae a la Bestia) 

¿Me escucháis, Bestia? Os estoy hablando.

BESTIA
Es... disculpadme...

BELLA
Bestia, ¿dónde estáis?

BESTIA
Disculpadme.
Disculpadme, no es nada.

BELLA
Pero, ¿qué os ocurre Bestia?

BESTIA
Tengo sed, Bella. 

(La Bella se dirige hacia una fuente) 

BELLA
Bebed de mis manos.

BESTIA
¿No os repugna darme de beber?

BELLA
No, Bestia, me complace. 
No quisiera causaros la más mínima pena.

BESTIA
No obstante, vuestro sueño es estar lejos de mí.

(Otro día. La Bestia entra en el salón a las siete y 
media) 

BELLA
¿Por qué llegáis tan tarde?

BESTIA
Os agradezco, Bella, que lo hayáis notado.

BELLA
Os esperaba, Bestia. Tengo que hablaros.

BESTIA
Bella. Bella. ¡Bella!

BELLA
No puedo vivir sin volver a ver a mi padre.

BESTIA
¡Levantaos, Bella, levantaos! 
Soy yo quien debería arrodillarse 
y estar a vuestras órdenes.

BELLA
¡Dejadme ir y volveré!

BESTIA
A vuestro regreso, Bella ¿seríais mi esposa?

BELLA
¡Me torturáis!

BESTIA
Yo sé que soy horrible, pero moriría de dolor 
si no volviera a veros...
Vos aprovecharéis para no volver. 

BELLA
Volvería al cabo de una semana. Os respeto 
demasiado para querer causar vuestra muerte.

BESTIA
Me acariciáis como se acaricia a un animal.

BELLA
Pero vos sois un animal.

BESTIA
Lo que me pedís es muy serio.
Tendré que pensarlo.
Bella, ¿queréis acompañarme al jardín?

(Salen hacia el jardín) 

Bella, ¿os han pedido en matrimonio?

BELLA
Sí, Bestia.

BESTIA
¡Ah!
¿Quién... os pidió en matrimonio?
¿Un hombre joven? 

BELLA
Sí, Bestia.

BESTIA
¿Era guapo? 

BELLA
Sí, Bestia.

BESTIA
¿Por qué no os casasteis con él? 

BELLA
No quería abandonar a mi padre.

BESTIA
¿Y cuál era el nombre de ese apuesto joven?

BELLA
Avenant...
Bestia, ¿qué os ocurre?

(La Bestia emprende la fuga)

¡Bestia, Bestia!... ¿Qué os pasa, Bestia?

(La misma tarde. Bella está en su habitación. 
La Bestia aparece en la puerta)

¿Qué hacéis delante de mi puerta?
¡Dios!... ¡Tenéis sangre!

BESTIA
Perdón...

BELLA
¿Por qué me pedís perdón?

BESTIA
Por ser una "bestia"... Perdonadme.

BELLA
Esas palabras no son propias de vos. 
¿No os avergonzáis?... ¡Limpiaos e iros a dormir!

BESTIA
¡Cerrad la puerta, rápido! ¡Rápido! ¡Cerrad!
Vuestra mirada me abrasa.
No puedo soportar vuestra mirada.

El Embargo de los Muebles 

(La casa del padre. Los ordenanzas incautan 
los muebles) 

AVENANT
Se lo llevan todo.

LUDOVIC
Verás como no nos dejan ni siquiera esta mesa.

AVENANT
Juguemos.

USURERO
Id a hablar a vuestro padre. No entiende nada. 
No soy yo quien debe decirle la verdad.

AVENANT
Ve tú.

(En el piso de arriba. El padre en la cama) 

PADRE
¡Ah!...
¡Ludovic, Ludovic, confiesa! 

LUDOVIC
Es cierto, lo confieso.

PADRE
¿Tú has hecho eso?

(De nuevo en la planta baja)

AVENANT
Señor, ese hombre está muy enfermo. 
Debéis dejarle su cama.

USURERO
¡Ah, sí, las camas, se las dejo!

LUDOVIC
Apuesto a que no han vaciado sus habitaciones...

USURERO
Tengo una garantía para vuestras hermanas.

La Confianza de La Bestia en Bella 

(En el castillo. Bella está en la cama) 

BESTIA
Bella, ¿estáis enferma?

BELLA
Sí, Bestia, estoy enferma.

BESTIA
¿Qué os ocurre?

BELLA
Mi padre se está muriendo.

BESTIA
No soporto veros enferma.

BELLA
¡Enviadme a casa de mi padre!

BESTIA
Si aceptase, ¿me juráis que regresaréis 
en una semana, y ni un día más?

BELLA
Os lo juro.

BESTIA
Venid, Bella.

(La conduce hasta el balcón) 

Mirad, Bella, ¿veis ese pabellón? 
Se llama el "Pabellón de Diana". 
Es el único lugar de mis dominios donde nadie 
puede entrar, ni vos, ni yo. 
Todo lo que poseo, lo poseo por magia, pero en 
ese pabellón están mis verdaderas riquezas. 
Se puede entrar con una llave de oro... Aquí está. 
Bella, os entrego la mayor prueba de confianza 
que puede darse en el mundo. 
Si no volvéis, moriré. Tras mi muerte, no deberéis 
temer nada, todas mis riquezas serán vuestras. 
Coged esta llave, Bella, conozco vuestra alma. 
Esta llave, en vuestras manos, 
será la prenda de que regresaréis.

BELLA
¿Consentís en mandarme a casa de mi padre?

BESTIA
Estaréis allí esta misma mañana. 
Mi noche no es la vuestra. Cuando aquí 
es de noche, es de día en vuestra casa. 
Bella, una rosa que ha desempeñado su papel, 
un espejo, mi llave de oro, mi caballo y mi guante 
son los cinco secretos de mi poder. 
Os los entrego. Sólo tendréis que poneros 
este guante en vuestra mano derecha 
y os transportará a donde deseéis. 
Recordad vuestra promesa... ¡Adiós, Bella!

Bella Regresa a Casa de su Padre 

(La Bella se pone el guante que la transporta a 
la habitación de su padre) 

PADRE
¿Estoy soñando?

BELLA
No padre, no soñáis. 
Soy yo, Bella, quien os habla.

PADRE
Te creía muerta. ¿Has podido huir?

BELLA
No, padre mío, me ha dejado venir a veros.

PADRE
¿Ese monstruo tiene alma?

BELLA
Él sufre, padre...
Una mitad de él lucha contra la otra.

PADRE
Bella, le vi... ¡Su cabeza era horrible!

BELLA
Sé que infunde mucho miedo. 
Pero si miro sus ojos, tan tristes, 
debo apartar los míos para no llorar. 

PADRE
Bella, ¿es que aceptas vivir con ese monstruo.

BELLA
Debo hacerlo. Ciertas fuerzas le obedecen. 
Otras fuerzas le dominan. Si me escapara,
cometería un crimen contra él, y contra vos.

PADRE
¿Acaso te amenaza?

BELLA
Sólo está junto a mí 
cuando su crueldad no es de temer. 
A veces, su porte es real...
Parece víctima de alguna enfermedad.

PADRE
¿Encuentras la manera de compadecerle?

BELLA
Sería feliz si lograra hacerle olvidar su fealdad.

PADRE
Bella, bella... te arrepentirás de ser tan buena...

BELLA
Padre, ese monstruo es bueno.

(Bella vierte una lágrima, que se transforma en 
un diamante) 

PADRE
¡Dios de los cielos, un diamante!... ¡Otro!

BELLA
Esa es la prueba de que las hadas le protegen, 
porque he llorado pensando en él.

PADRE
Tal vez estos diamantes sean obra del diablo.

BELLA
Tranquilizaos, padre, y guardadlos. 
Os devolverán la vida. Si se lo contáis 
a mis hermanas, no os quedará nada...

Bella Cuenta su Historia 

(En el patio. Adelaida y Felicie tienden la ropa. 
Ludovic da de comer a las gallinas y Avenant 
corta madera) 

FELICIE
¡Tengo las manos estropeadas! ¡Fíjate!

LUDOVIC
¡Es horrible!

ADELAIDA
Mira las mías. ¡Como una cocinera!

LUDOVIC
¡Las hermosas princesas! 
Cuando no se tiene dinero, ¡se trabaja!

ADELAIDA
¡Menudo cretino!

FELICIE
¡Puedes hablar, canalla! Si no nos hubieran 
requisado los muebles, aún tendríamos sirvienta. 

AVENANT
La culpa es mía. Podéis comprobar 
cómo lo estoy pagando personalmente.

ADELAIDA
¡Cuando no estás bebiendo
o jugando a los dados!

AVENANT
¡Sois tan encantadoras!
¿Cómo se encuentra vuestro padre? 

LUDOVIC
¿Crees que ellas se preocupan por él? 
Soy yo quien le cuida. 
Todavía está muy débil, no se puede levantar.

PADRE
¡Felicie! ¡Adelaida! ¡Ludovic!

FELICIE
¡Para muestra un botón!... 
¡Mirad, qué dama tan elegante! 
¡Y la acompaña mi padre!

ADELAIDA
¡Y nosotras con estos harapos!

AVENANT
Pero... ¡si es Bella!

LUDOVIC
¿Bella?... ¡Imposible!

FELICIE
¡Sí! 

(Dirigiéndose a Avenant) 

Y tú... ¡déjame tranquila!

AVENANT
¡Tú, siempre tan encantadora!

PADRE
¡Bella ha venido a verme!

LUDOVIC
(Dirigiéndose a Bella) 
Pero ¿de dónde sales tú?

FELICIE
¡Qué collar tan magnífico!

BELLA
¡Toma, Felicie, sobre ti lucirá aún más bello!

(Cuando Felicie toma el collar, se transforma 
en un pingajo repugnante) 

AVENANT
¡Dios!

ADELAIDA
¡Tira eso enseguida!... ¡Qué horror!

PADRE
Lo que la Bestia te ha dado, sólo es tuyo. 
No puedes dárselo a nadie.

FELICIE
Venga, Adelaida, vamos a vestirnos. 
¿Qué se habrá creído ésta?

LUDOVIC
¡Hasta la vista, graciosas criaturas.

(Las dos hermanas abandonan el patio) 

BELLA
¿Quién ha hecho mi colada?

AVENANT
¡Nosotros!

BELLA
Las sábanas arrastran por el suelo.

LUDOVIC
Entonces, ¿esa Bestia no era tan feroz?

BELLA
No, es una buena bestia.

AVENANT
¿Volveréis con él?

BELLA
Si, Avenat, lo prometí. La Bestia me dejó libre, 
y si no vuelvo, se morirá de dolor. 

AVENANT
¿Le amáis?

BELLA
No, Avenant. Mas bien... le aprecio. 
No es lo mismo.

(En la casa) 

ADELAIDA
El tribunal eclesiástico se interesaría mucho 
en el fenómeno del que hemos sido testigos.

(En el patio) 

BELLA
(Dirigiéndose a su padre) 
¡Hasta luego!

LUDOVIC
Vamos al cobertizo donde ellas 
no puedan escucharnos... ¡Cuenta!

BELLA
Me ha confiado la llave de su tesoro. 
Su confianza en mí es absoluta. 
Sería yo el monstruo, si no regresara.

LUDOVIC
¿Qué criadas te sirven?... ¿Tienes muchas?

BELLA
Son unas manos invisibles las que me visten, 
me peinan, quienes abren y cierran las puertas. 
Nunca veo a nadie.

AVENANT
¿Y esa bestia habla el lenguaje de los hombres?

BELLA
Sí. Habla como vos y yo.

LUDOVIC
¿Anda a cuatro patas? 
¿Qué es lo que come?

BELLA
Me deja darle de beber... 
¡y no me muerde!

El Plan 

(En la casa) 

FELICIE
¿Te das cuenta?

ADELAIDA
¡Es increíble!

FELICIE
Esta tontita es más feliz que nosotras...¡Y rica!
Hay muchos otros maridos 
que tienen pelo y cuernos.

ADELAIDA
Revienta de orgullo.

FELICIE
Tranquilízate... Yo no pierdo la cabeza. 
Seamos muy amables y dejemos que los chicos 
le tiren de la lengua.

(En la taberna) 

AVENANT
Saca tu fortuna.

LUDOVIC
Aquí está... ¡Es espantoso!

AVENANT
Hay que actuar. He tomado una decisión.

LUDOVIC
No hay nada que hacer.

AVENANT
Ludovic... 
La idea de que mañana Bella vuelva 
con esa Bestia es intolerable. 
Debemos matar a la Bestia. 

LUDOVIC
Y coger sus riquezas. 
Pero... ¿sabes que tiene poderes mágicos? 

AVENANT
No creo en los poderes mágicos. 
El monstruo adormece a Bella 
y le hace creer lo que quiere... 

LUDOVIC
Tengo miedo.

AVENANT
Si se trata de liberar a Bella, 
no tengo miedo de ningún poder del mundo.
Halaga a tus hermanas... 
Si descubren algún interés, 
impedirán que Bella se vaya.

LUDOVIC
Y ¿cómo encontrarás la casa de la Bestia?

AVENANT
Interrogaré a Bella, y le sacaré su secreto.

(Mas tarde. En la cocina) 

FELICIE
Nos frotaremos los ojos con cebollas 
y lloraremos.

ADELAIDA
Ella olerá ese insoportable aroma.

FELICIE
La fregona es demasiado estúpida para notarlo. 
La idea de Ludovic no es tan necia. Déjame hacer. 
¡Encantador! Adelante, vamos, vamos...

(Entran en la habitación de Bella llevando sus 
pañuelos en el rostro) 

¡Oh, Bella, quédate con nosotros!
A veces hemos sido injustas contigo...

ADELAIDA
Pero nada más perderte...

FELICIE
Hemos comprendido cuánto te queremos.

BELLA
¿Estáis llorando?

FELICIE
Si esa bestia te quiere, 
no le importará que prolongues tu estancia.

BELLA
¡Es imposible!

FELICIE
¿Quieres que padre y nosotras muramos de pena?
¡Bella, quédate!... 
¡Quédate, Bella, quédate con nosotros!

BELLA
No puedo.

FELICIE
No seas tan cruel... ¡Quédate!

BELLA
Adelaida, Adelaida, ¡mi hermanita!

FELICIE
Adelaida me ha dicho "he descubierto 
a nuestra Bella, y me moriría si nos abandona"

BELLA
No me tentéis...

FELICIE
¡No nos abandones mañana! Puedes explicarle 
a la Bestia que es por culpa de tus hermanas.

(Felicie ve la llave de oro colocada sobre la 
cómoda y la toma sin que lo note Bella) 

BELLA
No sabía que me queríais tanto.

FELICIE
Bella... ¡Eres un ángel! 

ADELAIDA
¡Somos tan felices! ¡Tan felices!

(Bella se arroja a la cama. Sus hermanas salen) 

Está llorando... 

FELICIE
Se quedará y nos repartiremos los tesoros. 

ADELAIDA
Vamos a lavarnos... ¡Apestas!

(Encuentran a Ludovic en el rellano) 

LUDOVIC
¿Y bien?  

FELICIE
Y bien, ¿qué?

LUDOVIC
¿Se queda?  

FELICIE
Se queda.

LUDOVIC
¿Tienes la llave?  

FELICIE
¡Mírala!

LUDOVIC
Dame.  

FELICIE
¿Para qué la quieres?

ADELAIDA
¡Dios sabe el uso que le darás! 

LUDOVIC
¡Pobre idiota!

FELICIE
Le daré esta llave a Avenant si se decide a partir.

LUDOVIC
Eres increíble. ¿Partir? ¿cómo? ¿Hacia adónde?  

FELICIE
¡Avenant se las arreglará!

La Pasión de Avenant 

(Cena en familia. Bella sirve la mesa) 

PADRE
Bella, pareces muy triste.

BELLA
No, padre.

FELICIE
Echa de menos sus lujos, 
y nuestra mediocridad la aflige.

PADRE
¡Felicie!... ¡Felicie!...

ADELAIDA
¡La Bestia debe de tener encantos 
que nosotros no poseemos!

PADRE
¡Ah!

FELICIE
Sin duda la señorita considera 
que ya no es de su rango servir la mesa.

(Bella sale apresuradamente de la habitación) 

PADRE
¡Bella! ¡Bella! 

(Avenant la aguarda fuera) 

AVENANT
¿Qué os han hecho? ¿Han sido sus hermanas? 
No han esperado mucho.... ¡Qué arpías! 
Bella, escuchadme, no lloréis más. 
Tengo que despertaros de esta pesadilla... 
¡Tengo que sacaros de aquí! 
Sé en lo que estáis pensando... Que soy un inútil. 
Pero a vuestro lado, 
trabajaré y abandonaré las tabernas. ¡Contestad!... 
¿Qué os pasa?... Ya veo, es la Bestia. 
Decidme el secreto que os permite encontrarle. 
Iré, y le mataré. No respondéis...Yo lo sabía. 
La Bestia ejerce algún hechizo sobre vos, 
al menos, vuestro corazón que conozco, 
no podría desearle algún mal. 
Bella, dejadme decirle, que ese monstruo no sufre. 
Si sufriera como sufro yo, 
volaría a vuestro encuentro, 
y os obligaría a seguirle. 
Descuidad, seguro que os ha olvidado...

(En el castillo. La Bestia espera ansiosamente el regreso 
de Bella) 

Magnífico Aparece 

(En el patio) 

FELICIE
¡Entrad rápido!... Aquí nadie nos descubrirá.

ADELAIDA
Naturalmente, llegáis tarde.

FELICIE
¿Y bien?

AVENANT
Mi decisión está tomada. No me echaré atrás.

LUDOVIC
Pero ¿cómo llegar hasta la Bestia?

FELICIE
¿No pudisteis descubrir cómo viaja Bella?

AVENANT
Bella dice lo que la Bestia le dice. 
Pero de eso ella no dice nada.

FELICIE
¡Al diablo! La atormentaré hasta que hable.

AVENANT
Si la hacéis sufrir, no contéis conmigo.
¿Qué es eso?... ¡Voy a ver!
¡Un caballo blanco!... Y solo....
Es Magnífico, estoy seguro. 
Ha abierto la verja y ha entrado en el patio. 

FELICIE
Es el cielo quien lo envía.

LUDOVIC
Es el infierno...

ADELAIDA
¡Tengo miedo!

FELICIE
¡Oh, cállate, idiota! 
Avenant, abrid la puerta y traed al caballo.

LUDOVIC
¡Que nadie se mueva!

AVENANT
Iré yo mismo.

FELICIE
La Bestia lo envió a buscar a Bella. 
Avenant, es a vos y a Ludovic 
a quienes el caballo llevará.

LUDOVIC
Hablas a tu acomodo.

FELICIE
¿Eres un hombre?

LUDOVIC
Me gustaría verte a ti.

AVENANT
No podemos perder un minuto.
¡Venga, sube, Ludovic!... ¡A la grupa! 

LUDOVIC
¡Dios nos proteja!

FELICIE
¡Vuestros arcos!

(Un saco cuelga de la silla) 

AVENANT
¿Qué es lo que me molesta? 

FELICIE
Una alforja. 
Si hay oro, no puedo tocarlo 
pues se convertirá en paja... Abridla

ADELAIDA
¡Un espejo!

FELICIE
Esto quiere decir: 
mirad una chica que rompe sus promesas.

LUDOVIC
La Bestia en realidad no es tan bestia.

FELICIE
Tomad, la llave... ¡En marcha, y buena suerte!

AVENANT
He olvidado la fórmula.

LUDOVIC
Es algo así como... ¡ve, ve, ve!

FELICIE
Si de vosotros dependiera 
no iríamos a ningún lado.
"¡Ve a donde yo voy, Magnífico, ve, ve, ve!"

AVENANT
¡Ve a donde yo voy, Magnífico, ve, ve, ve!

ADELAIDA
¡Ludovic!

FELICIE
Pero, ¿qué te pasa?

ADELAIDA
¿Y si les enviamos hacia la muerte? 

FELICIE
Estas loca.
¡El espejo!

El Espejo 

(Las dos hermanas regresan a la casa) 

ADELAIDA
No me siento cómoda.

FELICIE
(Dirigiendo el espejo hacia su hermana) 
¡Mírate, estás verde!

ADELAIDA
(ella se ve con las facciones de una anciana) 
¡Oh! 

(A su vez dirige el espejo hacia su hermana 
que se ve con los rasgos de un mono) 

¡Mira!

FELICIE
¡Oh! 

ADELAIDA
¿Qué es lo que ves?

FELICIE
Nada...
Llevémoselo a Bella. Es su turno. 

(Ellas entran en la habitación de Bella) 

La señorita se viste de princesa 
cuando se cree sola en su habitación.

ADELAIDA
¿Qué te has creído? 

FELICIE
Han dejado este espejo a tu nombre en la puerta. 
¡Te mostrará cómo 
debe transformarse una bella 
para gustar a una bestia!

(Bella toma el espejo y descubre la imagen de la 
Bestia que parece sufrir intensamente. Se pone el 
guante y queda transportada al castillo) 

BELLA
¡Oh! ¡La llave!... ¿La llave?
¿Dónde está la llave?
¡Dios mío!...
¡Bestia! ¡Bestia! ¡Bestia! ¡Bestia! 

(Ella encuentra a la Bestia yaciendo en el suelo) 

¡Contestadme, Bestia! ¡Bestia! ¡Bestia! ¡Bestia!...
¡Bestia! Perdón...
¡Contestadme, Bestia!... ¡Miradme! 
¡Vuestro guante os hará vivir!
¡Ayudadme! Yo soy el monstruo, Bestia...
¡Sé que viviréis!

BESTIA
Demasiado tarde...

El Pabellón 

(Ludovic y Avenant llegan al pabellón) 

LUDOVIC
¿Hemos llegado?

AVENANT
Sí, hemos llegado... 
Primero deberemos matar a la Bestia. 

LUDOVIC
La mataremos después.
¿Tienes la llave?... ¡Detente! 
Esta llave podía accionar algún mecanismo. 
Desconfiemos... 

AVENANT
¡Exacto, no entraremos por la puerta!... ¡Sígueme!
¡Trepa! 
¡Vamos, coraje!... Como siempre, tienes miedo.

LUDOVIC
No tengo miedo... creo.

AVENANT
¿Entonces, subes?

LUDOVIC
¿Dónde estamos?

AVENANT
Sobre la claraboya... ¡Mira!

(Ellos divisan un tesoro bajo el pabellón) 

LUDOVIC
¡Es fantástico!
Y eso... ¿qué es?

AVENANT
¡Un estatua de Diana! 

(Durante este tiempo, Bella se esfuerza 
desesperadamente por revivir a la Bestia) 

BELLA
No seáis cobarde. Tenéis unas garras poderosas. 
Aferraos a la vida. ¡Defendeos! 
¡Espantad a la muerte!

BESTIA
Bella, si yo fuera un hombre, 
sin duda haría las cosas que me decís. 
Pero las pobres bestias que quieren demostrar su 
amor sólo pueden arrastrarse por el suelo y morir.

AVENANT
(Sobre el techo del pabellón)
Voy a romper los cristales.

LUDOVIC
¡No! 

AVENANT
El vidrio es sólo vidrio. 
Me sujetarás con todas tus fuerzas por las manos
y saltaré.

LUDOVIC
Está muy alto.

AVENANT
¡Saltaré!

LUDOVIC
¿Y cómo haremos para sacar el tesoro?

AVENANT
Ya nos apañaremos. 
Lo principal es estar en el sitio. 
Bájame.... Sujeta fuerte... Espera. 
¡Espera un poco! Me soltarás cuando yo te diga...

(La estatua de Diana lanza una flecha a Avenant) 

¡Oh!

(Avenant se transforma en la Bestia. Su caída al 
suelo es mortal. En ese preciso instante, la Bestia 
se transforma en un príncipe encantador) 

BELLA
¿Dónde estáis, Bestia?

La Metamorfosis 

ARDENT
La Bestia ya no existe, Bella, era yo. 
Mis padres no creían en las hadas, 
y los castigaron en mi persona. 
Sólo podía ser salvado por una mirada de amor.

BELLA
¿Semejantes prodigios son posibles?

ARDENT
Nosotros somos la prueba. 
El amor puede convertir a un hombre en bestia. 
El amor puede hacer que un hombre feo 
se vuelva hermoso. 
¿Qué os pasa, Bella? 
Se diría que añoráis mi fealdad.

BELLA
No es eso, mi señor, 
pero os parecéis a alguien que conocí.

ARDENT
¿A quién?

BELLA
Al amigo de mi hermano.

ARDENT
¿Le amabais?

BELLA
Sí.

ARDENT
¿Él lo sabía?

BELLA
No.

ARDENT
Y amáis a la Bestia.

BELLA
¡Sí!

ARDENT
Sois una muchacha extraña, Bella... 
una muchacha extraña.

BELLA
Para serviros.

ARDENT
¿Os desagrada que me parezca 
a ese amigo de vuestro hermano?

BELLA
Sí...
No. 

ARDENT
La primera vez que os tuve en mis brazos, 
yo era la Bestia. ¿Sois feliz?

BELLA
Tendré que acostumbrarme. 
¿A dónde me llevaréis?

ARDENT
A mi reino donde seréis una gran reina. 
Allí estará vuestro padre, y vuestras hermanas 
os llevarán la cola del vestido. 

BELLA
¿Está muy lejos? 

ARDENT
Volaremos hasta él por los aires... ¿Tenéis miedo?

BELLA
Me gusta tener miedo... ¡con vos!

ARDENT
¡Bella! ¡Nos vamos! ¡En marcha!

(Vuelan juntos atravesando las nubes) 



Escaneado y Traducido por:
Juan Carlos Ramiro 2009